Annoncé lors du salon de Farnbourouh de 2018, le programme Futur Combat Air System et le chasseur de 6ème génération Tempest britannique était alors perçu par de nombreux experts comme une réponse d’orgueil à l’annonce du lancement prochain du programme SCAF franco-allemand à l’automne 2017. Et même si des partenaires européens, comme l’italien Leonardo ou le missilier MBDA, participaient au programme britannique, de nombreuses interrogations subsistaient quant à la soutenabilité budgétaire d’un tel programme par Londres. Pour autant, la determination politique des britanniques ne vacilla pas, et les premiers investissements significatifs pour le développement du programme ne tardèrent pas à être annoncés, avec au passage un modèle économique piloté par PWc basé non pas sur la dépense publique, mais sur le solde budgétaire et social de l’investissement consenti. De fait, là ou SCAF peinait à dépasser les divergences politiques franco-allemandes et voyait ses délais glissés de plus d’une année par an, le FCAS poursuivit ses travaux, au point d’attirer de nouveaux partenaires d’état. D’abord l’Italie en janvier 2021, puis une année plus tard, le Japon en fusionnant le programme Tempest européen et F-X nippon.
De fait, aujourd’hui, non seulement le programme FCAS, renommé depuis Global Combat Air Program, est-il sécurisé, mais il offre même des paramètres structurels beaucoup plus robustes que ne le fait le programme SCAF, marqué par une année de bras de fer entre Dassault Aviation et Airbus Defense & Space pour le pilotage du 1er pilier du programme visant à concevoir le Next Génération Fighter, l’avion de combat au coeur du système de systèmes. En effet, d’une part, la complémentarité des savoir-faire au sein de GCAP facilite le partage industriel au sein du programme, d’autant que la Grande-Bretagne, du fait de son expérience, demeure le pilote principal et notamment le concepteur de l’avion de combat Tempest. En outre, les ambitions avancées par les 3 partenaires du programme GCAP en matière d’investissement de défense, sont toutes supérieures à celles avancées par leurs miroirs du programme SCAF, avec notamment le Japon qui vise un budget des armées au delà de 100 Md$ là ou l’Allemagne ne vise que 85 Md$. Enfin, les 3 pays partagent une architecture similaire pour le devenir de leurs forces aériennes.
En effet, Londres comme Tokyo et Rome sont déjà d’importants utilisateurs du F-35 Lightning II, notamment de la version B à décollage et atterrissage vertical ou court pour armer les porte-avions Queen Elizabeth et Prince of Walles britanniques, les porte-avions légers Izumo et Kaga japonais et les porte-aéronefs Cavour et Trieste italiens. En outre, il est probable que comme les forces aériennes d’autodéfense nippones et les forces aériennes italiennes, la Royal Air Force se dotera bien à l’avenir de F-35A en complément des F-35B de son aéronavale, de sorte à densifier ses capacités de frappes et de suppression des défenses adverses. La situation est beaucoup moins claire au sein du programme SCAF, où la France veut effectivement un appareil entièrement polyvalent pour remplacer ses Rafale, alors que l’Allemagne et très probablement l’Espagne, mettront au moins en oeuvre une flotte réduite de F-35, le premier pour assurer la mission nucléaire de l’OTAN, le second pour armer son porte-aéronef Juan Carlos I, avec un risque bien sensible que des commandes complémentaires ne viennent, notamment pour compenser les glissements de calendrier du programme SCAF. Toutefois, au delà de ces aspects technologiques et économiques, ces éléments induisent que les deux programmes SCAF et GCAP pourraient bien avoir une finalité très différente, le second visant de plus en plus ouvertement à devenir, à l’instar des NGAD américains, un appareil de supériorité aérienne plus qu’un appareil pleinement polyvalent